Il existe, pas très loin d'ici, à l'intérieur du musée, quelque part dans ce bâtiment en brique rouge, une pièce dont l'entrée est en partie dérobée.
 

À un moment donné, on ne peut pas dire quand, c'est difficile de dater ça. Mais à un moment donné, on a arrêté d'entrer dans cette pièce. Au départ on a juste laissé, devant la porte, un ou deux tabourets qui gênaient, dans la salle de réunion. Puis des livres passés de mode se sont entassés négligemment sur ces tabourets. Et des plantes devenues trop encombrantes pour les bureaux. Des plantes qui ne devaient rester que quelques semaines devant la porte, y sont restées des mois. Peu à peu les objets se sont accumulés. Des chaises. Des piles de cartons remplis de documents, des dossiers. Des maquettes, des panneaux, des affiches. Rendant le passage compliqué, presque hostile. (...) 

En juin dernier une stagiaire a demandé si elle pouvait entrer dans la pièce. On a souri. Bien sûr que c'était autorisé. Comment avait-elle eu connaissance de cette pièce, personne ne le sait. On lui a indiqué le chemin à prendre. Au bout d'une demie heure elle est revenue les cheveux ébouriffés, les joues rouges et le souffle court. Elle n'avait pas trouvé l'entrée. On a souri et un peu bougonné. C'est tellement facile de se moquer des jeunes femmes en stage. On s'est levé pour lui montrer le chemin et l'emmener jusqu'à la petite pièce. Est-ce qu'on avait accroché des planches sur la porte pour créer une étagère ? Ou est-ce qu'un mur avait été construit devant la porte ? En tous cas, on a arpenté plusieurs fois les couloirs du musée, inspecté chaque mur, pas la moindre trace de cette porte. Il a bien fallu se rendre à l'évidence : la pièce avait tout simplement disparu.

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